Contexte
Kumusta,
Deuxième plus grand archipel au monde après l’Indonésie, les Philippines sont constituées de plus de 7000 îles accueillant un peu plus de 100 millions d’habitants. Si le philippin (le Tagalog) est la langue officielle, l’anglais est parlé par une majeure partie de la population, complété par plus de 170 dialectes utilisés dans l’archipel.
L’histoire du pays est marquée par l’influence espagnole puis américaine. Pays de contraste à la croissance économique soutenue: les zones rurales ne profitent que partiellement de la redistribution des richesses laissant un bon nombre de résidents en situation de grande pauvreté. A Manille, bidonvilles et misère côtoient les gratte-ciel du quartier d’affaires de Makati.
Comme au Cap-Vert, je me retrouve avec Gaël, un ami d’enfance, pour une nouvelle étape de BSF.
Une fois sur place, nous réalisons rapidement que mener ce projet allait être plus compliqué que prévu. Cela tombe bien, nous avions pris au préalable quelques contacts avec des associations qui allaient nous apporter un soutien bien appréciable tout en nous faisant découvrir des projets associatifs fascinants. Merci au passage à Football for Humanity et Gawad Kalinga pour l’aide précieuse apportée.
Après moult péripéties, rencontres, déplacements, attaques de moustiques, nous voici enfin prêt à embarquer vers une école.
La visite de l’école et la remise des ballons
Ce jeudi 29 novembre 2018, il nous aura fallu une bonne heure de bateau depuis Port-Barton avant d’accoster sur l’île d’Albaguen. Sur cette île de 800 habitants, nous sommes accueillis à notre descente du bateau par quelques enfants qui nous montrent le chemin de l’école. C’est Jaibie S., enseignante en maternelle et CP, qui nous reçoit. Il est à peine 10h, et le soleil cogne déjà fort. Une quarantaine d’enfants (et deux chiens !) patientent sagement à l’ombre et nous souhaitent la bienvenue. Des parents d’élèves nous offrent du lait de coco et des pancakes afin de nous restaurer, pendant que quatre enfants effectuent de jolis pas de danses. Bien ressourcés, c’est désormais à nous d’entrer en action. Je m’adresse aux enfants afin de me présenter, d’expliquer le projet BSF et j’en profite pour poser quelques questions. Timides au départ, les enfants prennent progressivement confiance et nous parlent de jeux de ballons, des propos complétés par l’enseignante. Trois vidéos sont alors diffusées : la découverte d’une école primaire française et de ses environs, et deux concernant des jeux de ballons (balle assise et balle aux prisonniers).
En effet, trois classes françaises de Laillé et Chenôve étaient impliquées dans ce projet et avaient préparé des vidéos mais également divers cadeaux à remettre aux philippins. Ce sont donc des dessins, des bracelets et des portes clés qui furent donnés à l’enseignante… à qui j’ai laissé le soin de procéder à la distribution car les enfants étaient soudainement moins calmes ! Après une rapide visite des classes et quelques échanges de volley ball, il était déjà l’heure de procéder à la remise des ballons.
Enchantés par cette première visite d’école, nous étions accueillis 5 jours plus tard dans une école privée à Coron, sur l’île de Busuanga. Bien moins traditionnelle, la visite de cette école aura été tout de même très appréciable car nous avons pu observer plusieurs jeux de ballons pratiqués par les enfants de cette école : basketball, volleyball et quelques prémices de football ! Deux ballons et une pompe ont également été remis à cette école (offerts par la mairie de Laillé, Bretagne) en échange d’un ballon de basket. Si vous souhaitez en savoir plus sur ce partenariat, c’est ici.
« C’est grâce à l’implication des 64 élèves de Laillé et Chenôve et leurs encadrant, ainsi qu’à nos partenaires, que cette étape philippine a pu prendre une dimension si particulière. Avec à la clé : une très belle collaboration et des rencontres inattendues ! Merci à tous. »
Jérôme
Les jeux découverts
Le basket est le sport roi aux Philippines, suivi par le volleyball et le badminton. Etonnamment, le foot est considéré comme un sport élitiste : il faut une surface de jeu conséquente pour organiser un match.
Les jeux avec ballon
Bato bola : se rapprochant de la balle aux prisonniers, ce jeu oppose deux équipes sur un terrain rectangulaire (à adapter en fonction du nombre de joueurs). L’équipe A se positionne sur la partie centrale du terrain, alors que l’équipe B se répartie de part et d’autre. Le but pour l’équipe A est d’éviter de se faire toucher par les lancers de balle effectués par l’équipe B. L’équipe B doit éliminer l’ensemble des joueurs de l’équipe A en les touchant avec le ballon. Chaque fois qu’un joueur de l’équipe A est touché, il quitte le terrain. Lorsqu’il ne reste qu’un seul joueur de l’équipe A, l’équipe B a le droit à 3 essais pour l’éliminer. En cas d’échec, l’ensemble des joueurs de l’équipe A revient sur le terrain. Une vidéo valant souvent mieux qu’un long texte : c’est ici.
Sepak takraw : ce jeu déjà observe en Thaïlande et Birmanie n’est plus à présenter… enfin si quand même. Une fiche récapitulant les informations sur ce jeu est en cours d’élaboration (à la plume : Sylvain L., ancien joueur de l’équipe de France de ce sport). En attendant, vous pouvez vous familiariser avec ce jeu grâce à cet article.
Les jeux sans ballon
Patintero (Essaye de traverser ma ligne sans te faire toucher ou attraper) : c’est l’un des jeux traditionnels les plus populaires, souvent pratiqué les soirs de pleine lune par des enfants et/ou adultes. Il faut au moins 6 joueurs répartis dans 2 équipes du même nombre : une qui attaque (les coureurs) et une qui défend (appelés « it »). Le terrain peut être modulable à souhait (en longueur, largeur, nombre de divisions…), l’idée étant de tracer un rectangle divisé en au moins 4 parties égales. L’équipe qui défend se répartie sur chaque ligne horizontale, et un joueur se positionne sur la ligne verticale du centre : il s’appelle « Patotot » Les défenseurs doivent garder leurs eux pieds sur la ligne quand ils se déplacent ou essaye d’attraper un coureur. Les coureurs doivent aller d’un bout à l’autre du terrain puis revenir sans se faire toucher pour marquer un point. Si l’un des coureurs se fait toucher, les équipes s’inversent et les coureurs deviennent les défenseurs (une variante élimine le joueur lorsqu’il est touché jusqu’à ce que l’ensemble des coureurs soit éliminé). Pour la première partie, les rôles défenseurs/coureurs se déterminent par un pierre/feuille/ciseau (ou en tirant à pile ou face) entre les deux capitaines. Pour démarrer le jeu, un coureur tape dans la main d’un défenseur. La partie peut se terminer après un nombre défini au préalable de points marqués, ou bien de manches ou après un temps défini (dans ces deux derniers cas, l’équipe qui aura marqué le plus de point gagne). Les perdants doivent porter sur leurs dos les vainqueurs d’un bout à l’autre du terrain, puis revenir. Pour mieux comprendre, voir ici ou là.
Petite astuce : si le sol est sec ou sur du sable, la délimitation peut se faire en versant de l’eau sur le sol. Et lorsque le sol est humide, un bâton fait l’affaire.
A noter que le gouvernement impose aux établissements possédant des infrastructures sportives, de les mettre à disposition du grand public à la tombée de la nuit (vers 18h), moment où la température est plus clémente. C’est ainsi que l’on a pu observer des adolescents en plein match de basket dans l’enceinte d’un commissariat. A Coron, sur la place principale, les plus jeunes jouent à se lancer des balles de tennis, pendant que d’autres entament une partie de Sepak takraw. Un peu plus loin, des enfants démarrent une partie de badminton pendant que des adolescents composent des équipes de basket qui vont s’affronter. Sur cette même place, des adultes plus ou moins âgés se sont réunis pour danser en suivant une chorégraphie. Ainsi, plusieurs générations se côtoient, pratiquant une multitude d’activités dans une ambiance festive et sereine.
Le système éducatif
Le système éducatif se compose de la façon suivante : la maternelle qui est facultative, un enseignement obligatoire incluant le primaire (Paaralang Elementarya) de 6 à 11 ans (grades 1 à 6) et le secondaire (Paaralang Sekundarya – Junior High School) de 12 à 15 ans (grades 7 à 10), puis une orientation vers un enseignement technique ou supérieur. Depuis 2013, la dernière année de maternelle ainsi que le cycle d’éducation nommé K-12 imposent un enseignement obligatoire et gratuit jusqu’au grade 12, Paaralang Sekundarya – Senior high school), mais en pratique, cette obligation n’est souvent appliquée que jusqu’au grade 10. La fin de chaque cycle est sanctionnée par un diplôme élémentaire (fin du grade 6) et secondaire de 1er cycle (fin du grade 10) : « College Entrance examination », voir même d’un diplôme d’études après le grade 12, le TESDA.
Bien qu’obligatoire, l’uniforme est porté par les enfants des écoles privées, alors que dans le public il n’est porté que dans certains établissements.
L’accès à l’éducation reste sujet à certaines inégalités : entre les inégalités sociales et le trajet parfois long pour rejoindre l’école (plusieurs heures de bateau pour certaines familles), il n’est pas toujours évident d’organiser l’acheminement des enfants.
Aux Philippines, il y a de nombreuses écoles privées, et beaucoup d’entre elles sont catholiques. Le philippin et l’anglais intègrent progressivement le programme d’enseignement à partir des grades 4 à 6 afin de se substituer aux dialectes.
Sur l’île d’Albaguen, une journée scolaire commence à 8h, s’achevant par une récréation d’une heure jusqu’à 17h (pause repas de 12h à 13h). Il n’y a pas de récréation le matin car il fait trop chaud.
L’année scolaire s’étend de juin à mars.
Pour aller plus loin
Deux écoles visitées, deux méthodes d’enseignement différentes : assez commune avec un enseignant pour une vingtaine d’élèves sur l’île d’Albaguen ; basée sur l’autonomie de l’enfant et des classes réduites à 12 élèves sur Coron (île de Busuanga).
Dans ce dernier établissement, la classe se compose de tables alignées où les élèves prennent place, séparés de leurs voisins par une petite cloison. Ils doivent étudier une centaine de manuels (booklet) par an, chacun étant composé d’une quinzaine de pages et mélangeant leçons et exercices. Une fois le manuel terminé, l’élève passe un test de connaissances validé ensuite par l’enseignant. L’écolier recherche lui même la solution à ses erreurs dans un classeur regroupant l’ensemble des réponses et fournissant les explications. Il obtient un score dans chaque discipline, qui lui permet d’obtenir chaque mois une récompense (plus l’élève est performant, plus il obtient de points, plus il peut solliciter une récompense intéressante : il y a divers objets comme des livres, statuettes, images…). Il est rare qu’un enfant ne termine pas la centaine de manuels avant de passer au niveau suivant, mais le cas échéant, il doit revenir pendant la coupure estivale afin de terminer son apprentissage. L’enfant avance donc à son rythme.
En parallèle, une place importante est accordée aux activités physiques ainsi qu’aux jeux traditionnels afin de perpétuer la connaissance entre générations de jeux tels Bato bola (voir plus haut).
Galerie photo
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